Le week-end pascal pourrait sauver une saison torpillée par le confinement
Les vacances de Pâques sont traditionnellement, pour le secteur du chocolat, l’une des périodes les plus fastes de l’année, avec la Saint-Nicolas et les fêtes de fin d’année. Ce week-end de Pâques, malgré la crise du coronavirus et le confinement qui en a découlé, ne devrait pas déroger à la règle.
S’ils avouent connaître, comme quasi tous les autres secteurs, une période assez délicate avec une baisse allant jusque parfois 80% de leur chiffre d’affaires, les artisans chocolatiers sont toujours actifs actuellement. Mais en raison des mesures de confinement et de distanciation sociale émises pour lutter contre la propagation du coronavirus, les chocolatiers ont dû adapter leur méthode de travail.
Des bas… et des hauts
Exemple à Uccle où Jérôme Grimonpon excelle dans l’art de sublimer le chocolat depuis 7 ans. “J’ai perdu 50 % de ma clientèle, j’ai fermé une semaine et j’ai dû mettre une partie de mon personnel en chômage temporaire, explique-t-il. C’est la première fois que ça m’arrive en sept ans. Jusqu’il y a dix jours, je travaillais seul mais à l’approche de Pâques, j’ai demandé à un travailleur de venir m’aider. Dans l’atelier, on porte gants et masques et on respecte scrupuleusement les règles de distanciation.”
Idem côté client : Jérôme Grimonpon a mis en place un système de rendez-vous (c’est complet pour ce week-end !) et les clients ne peuvent plus se présenter qu’un par un dans sa boutique. “Ca permet aussi d’avoir un contact personnalisé avec les clients. On discute un peu plus longtemps. Ca remonte le moral de tout le monde.”
Le chocolat est aussi un remontant très apprécié. Installée du côté de Fosses-la-Ville, Chantale Florent ne dira pas le contraire, elle qui croule sous les commandes. “Une praline, ça fait toujours plaisir, confie-t-elle. Surtout en ce moment où le moral des gens baissent. D’ailleurs, après l’annonce du confinement, on n’avait quasiment plus de clients. Les gens avaient le moral assez bas. Mais à l’approche de Pâques, ils se sont réveillés. Et aujourd’hui, on a dû arrêter de prendre des commandes par Internet car on n’arrive plus à suivre.”
On n’arrive plus à suivre !
Chantale a retrouvé le sourire qu’elle avait (presque) perdu au lendemain de l’annonce du confinement. “Le premier samedi, on a eu trois clients. J’ai même fermé à midi. Ca ne servait à rien de rester ouvert. C’en était démoralisant. On a stoppé la production car le stock ne s’écoulait pas. Durant 2,5 semaines, nous n’avons quasiment pas eu de clients. J’ai dû fermer une de mes deux boutiques. Mais aujourd’hui, c’est reparti. Tellement bien qu’on n’arrive plus à suivre. Ca ne permettra sans doute pas de sauver Pâques mais de limiter la casse.”
Les oeufs, lapins, cloches et pralines partent désormais comme des petits pains. “Mercredi, une maison de repos nous a commandés 17 kg de petits oeufs qu’il fallait livrer dans la journée !”
Alors qu’elle avait mis en place un système de livraison, elle a dû y mettre fin pour des raisons pratiques. “Il faut donc venir directement à la boutique pour effectuer ses commandes.”
A Wavre, Lionel Focant, alias Lio, l’espère tout autant, lui qui a dû fermer durant trois semaines. “On a décidé de rouvrir pour Pâques, explique-t-il. Ouvrir pour deux clients par jour, ça n’en valait pas la peine. Et produire des oeufs en chocolat pour devoir les jeter, ce n’est pas bon pour le moral.”
Les oeufs sont évidemment les best-sellers actuellement, chez celui qui avait remporté le prix de meilleure praline du Brabant wallon en 2009. “Avec les fêtes de Pâques, beaucoup de gens se déplacent. Ils veulent faire plaisir aux enfants qui ne comprennent pas forcément tout ce qui se passe.”
Les chocolatiers artisanaux constituent donc une belle parenthèse en ces temps de confinement. Et croquer dans une praline ou un oeuf en chocolat procure à coup sûr, un moment d’évasion, même s’il ne dure que quelques secondes.
Les grands groupes souffrent aussi
Les chocolatiers artisanaux ne sont pas les seuls à souffrir de la crise : les grandes entreprises du secteur sont aussi concernées, les exportations étant en chute libre. Exemple avec Neuhaus dont le père fondateur, Jean Neuhaus, a inventé la praline en 1912.
La société a été contrainte par le confinement de fermer un tiers de ses boutiques. Dont une bonne partie au sein des aéroports. “Les gens aiment offrir des cadeaux quand ils reviennent de Belgique. Et le chocolat est un cadeau typique de chez nous, confie Caroline Vindevogel, responsable communication chez Neuhaus. Mais avec les aéroports fermés, c’est une source très importante de clientèle en moins.”
Neuhaus a dont décidé de faire de la livraison à domicile. “On peut acheter son ballotin voire en offrir via notre site Internet et le faire livrer à l’adresse souhaitée.”
Au final, Neuhaus a dû mettre 80 % de son personnel en chômage économique temporaire. Le groupe espère pouvoir redresser la barre avec ce week-end pascal.
Yannick Natelhoff