Le Bruxellois Maxime Ullens a été désigné pour son travail au Domaine de Marzilly en Champagne
L’anecdote pourrait faire sourire d’autant que les Français s’amusent à entretenir un prétendu seum depuis une certaine demi-finale de la coupe du monde de football en Russie en 2018. Le prestigieux guide gastronomique Gault et Millau version France 2020 a désigné un Belge comme meilleur vigneron de l’année. Maxime Ullens ne regrette pas d’avoir tout lâché pour s’installer à Hermonville sur la Montagne de Reims. Son Domaine de Marzilly ne produit que 25.000 bouteilles par an depuis 2017 et risque, avec ce fabuleux coup de projecteur, d’être très (trop…) demandé.
« Ce prix nous a vraiment surpris mais il ravit toute l’équipe, affirme Maxime Ullens de Schotten, le vigneron propriétaire. Je pense que le Gault et Millau a récompensé l’ensemble du projet avec la rénovation entière du domaine, la réssurection des pieds de vignes mais aussi des détails qui le ne sont pas pour nous : nous utilisons les arbres de notre domaine pour confectionner les fûts, nous concoctons notre propre levure, etc.. »
Rien, sinon la passion du vin depuis des années (« je programmais des visites viticoles durant mes vacances », avoue-t-il), ne prédestinait ce patron bruxellois d’une société de rénovation en bâtiment à venir faire sauter des bouchons dans ce coin de la France où la concurrence est rude.
« A l’origine, je n’avais pas l’intention d’exploiter le domaine. Je voulais simplement le rénover après l’avoir acquis en 2012. Après avoir pris des cours au lycée viticole, nous avons relancé des vignes endormies depuis les années 20. »
Aujourd’hui, son exploitation n’est que de 20 ares en propriété propre (en Champagne, les propriétés sont très parcellaires) et de 3.5 hectares en location mais il a déjà réussi à se faire une place au soleil champenois. Notamment grâce à Arnaud Lallement, le chef triplement étoilé de « L’Assiette champenoise » à Tinqueux dans la très proche banlieue de Reims.
« Avec la cave du Forum située en plein cœur de Reims, il a été le moteur de nombreux producteurs. Il a goûté notre champagne, il a apprécié et il le promotionne. Il fut l’un de mes premiers clients et continue à mettre notre cuvée (une deuxième est prévue en 2020) à la carte de son prestigieux établissement. »
Avec 25.000 bouteilles par an, dont une partie ne sera vendue que dans deux ou trois ans et d’autres dans dix ans vieillissement oblige, il va sans doute être contraint de refuser les demandes que ce prix du vigneron de l’année ne manqueront pas de susciter. Pour un particulier, seule possiblité en Belgique : commander chez vins De Coninck ou dans l’une ou l’autre adresse qui a déjà succombé et qui a réussi à choper quelques flacons (comme La Charcuterie à Bruxelles). Pour les connaisseurs, sa cuvée est composée de 56% de Pinot Meunier, 37% de Chardonnay (le cépage le plus traditionnel en Champagne) et de 7% de Pinot Noir.
Un Belge élu vigneron de l’année dans un pays viticole où la fierté nationale est érigée en étendard, cela mérite de sabrer le… champagne.
Jean-Marc Ghéraille